Les contractuels, clé de voûte d’une fonction publique modernisée ?

En plaçant l'extension du recours aux contractuels au cœur des nombreux chantiers de concertation et de modernisation de la fonction publique, lancés ces derniers mois, le gouvernement a choisi d'assumer un virage historique.

Dans son document d’orientation « Refonder le contrat social avec les agents publics », le ministère de l’Action et des comptes publics indiquait clairement en mars dernier que l’objectif du gouvernement est « d’accorder plus de souplesse et de liberté aux employeurs publics pour recruter leurs équipes, y compris par voie de contrat » et qu’il s’agit « d’offrir plus de visibilité et de garanties, en matière d’évolution professionnelle, pour les agents contractuels ainsi recrutés ».
Le 21 mai, devant les partenaires sociaux, le secrétaire d’Etat en charge de la fonction publique Olivier Dussopt enfonçait le clou en précisant que les débats menés actuellement au sein de la fonction publique devaient « permettre d’aller plus loin dans la reconnaissance d’une complémentarité des statuts et des profils pour répondre aux évolutions des services publics ».

970 000 contractuels tous versants confondus

Alors que la fonction publique, tous versants confondus, compte aujourd’hui 970 000 contractuels (25% dans la FPT, 21% dans la FPH et 21% dans la FPE), l’extension du recours au contrat peut-elle faire basculer la sphère publique dans une nouvelle dimension ?
C’est en tout cas ce que redoutent les organisations syndicales de fonctionnaires qui demeurent vent debout contre toute mesure susceptible de renforcer la précarisation des agents et d’introduire un coin dans le statut et l’égalité d’accès à la fonction publique.

Le point de vue des employeurs publics

En revanche, du côté des employeurs publics et de certaines associations professionnelles, les jugements sont plus nuancés. Philippe Laurent, président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, propose ainsi que les employeurs puissent recourir à des contrats courts avec des agents publics à l’occasion de missions précises. En outre, dans un manifeste commun portant sur l’avenir de la fonction publique territoriale, deux associations d’élus -France Urbaine et l’Association des petites villes de France (APVF)- se prononcent aussi en faveur du « recours aux contrats de 3 ans renouvelables pour des postes de catégorie B et C lorsque la nature des besoins le justifie ». De son côté, l’Association des DRH des grandes collectivités se dit favorable à la création de « CDD de mission, à condition que ces contrats soient justifiés par une politique publique particulière, qu’ils soient limités à 6 ans (et non soumis à l’obligation de prouver l’absence de fonctionnaire adapté pour le poste) et qu’ils n’ouvrent pas droit à une CDIsation ».

Bilan mitigé de la « loi Sauvadet »

Les évolutions, qui semblent se profiler dans le cadre de la modernisation de la fonction publique, marquent donc un tournant avec les orientations gouvernementales de ces dernières années. Il faut dire que le dispositif imaginé en 2012 par le ministre de la fonction publique du gouvernement Sarkozy, dite « loi Sauvadet, » arrivera à son terme en 2018 (à l’exception d’une prolongation jusqu’en 2020 pour certains contractuels de la fonction publique d’Etat), et que son bilan s’annonce mitigé. Selon un bilan d’étape, entre 2013 et 2017, le processus de titularisation n’aurait en effet concerné que 54 000 contractuels pour 99 000 postes ouverts (alors que 125 000 agents contractuels étaient potentiellement concernés par le texte).
Même si Olivier Dussopt prend le soin de préciser que « le recrutement de contractuels, au même titre que le recrutement de titulaires, doit être exempt de tout risque de discrimination » et qu’il « faudra l’entourer de nouvelles garanties en termes de transparence, d’objectivité et d’efficacité », c’est bien une nouvelle page de l’histoire de la fonction publique qui est en train de s’écrire.

Emmanuelle Quémard

 

5 conseils pour gérer la (sur)charge mentale au bureau

5 conseils pour gérer la surcharge mentale au bureau « On ne peut pas contracter le doigt et le détendre en même temps», rappelle le neurobiologiste Jean-Philippe Lachaux dans l’émission La Tête au Carré. Évident ? Pourtant, c’est cette exigence contradictoire que l’hyperconnexion et le travail multitâches font subir à nos neurones, jusqu’à l'excès de charge mentale. Pour se protéger, deux solutions : s’isoler dans une grotte… Ou utiliser des outils adaptés ! A lire sur Etoile Mag Actualités.

C’est prouvé : la surcharge mentale nuit au travail. Dans un documentaire sur l’hyperconnexion, des chercheurs affirment que le travail multitâches augmente le temps de traitement et les erreurs, que les mails provoquent stress et baisse de productivité, que la capacité d’attention baisse…

Bien gérer sa boite mail

L’ennemi numéro un de la surcharge mentale, c’est le mail. Pour éviter la surcharge d’informations, le MOOC Gérer son temps à l’ère du digital suggère de trier sa boite mail en deux dossiers : « À traiter » et « Archives ». A la réception d’un mail, il est conseillé de faire immédiatement ce qui prend moins de deux minutes, et de planifier le reste. Il est aussi préconisé d’éviter de lire ses mails dès l’arrivée au travail, et de se fixer un nombre limité de consultations quotidiennes. Pour les urgences, le téléphone est plus adapté.

Découper chaque tâche en plusieurs « mini-missions »

Dans le documentaire de Laurence Serfaty, le neurologue Jean-Philippe Lachaux propose de décomposer chaque tâche en plusieurs « mini-missions ». La célèbre méthode GTD de David Allen s’appuie sur cette idée. Pour faire sa to-do list, il existe des applications sur smartphone – mais un bon vieux calepin peut faire l’affaire.

Rester concentré avec la méthode Pomodoro

Pour la concentration, la méthode Pomodoro (« méthode tomate ») est simple et très efficace. Elle consiste à découper le temps de travail en tranches de 25 minutes, entrecoupées de pauses de cinq minutes. Elle peut se mettre en place avec une application comme Brain Focus. Autre outil, l’application Quality Time qui bloque les notifications du smartphone. Plus originale, l’application Coffeetivity reproduit le fond sonore d’un café : d’après certaines études citées par Slate, travailler dans un bruit raisonnable stimulerait la créativité.

Contrer l’effet Zeigarnik pour garder la motivation

En 1927, la psychologue Russe Bluma Zeigarnik avait remarqué que l’humain se souvenait mieux d’une tâche inachevée qu’achevée. C’est l’effet Zeigarnik. Pour le contrer, prendre quelques minutes le soir pour considérer les choses faites ou, comme le propose le site Cadreo, adopter des supports qui gardent la mémoire des tâches achevées.

Faire des pauses… productives !

Dans le documentaire Hyperconnectés : le cerveau en surcharge, le chercheur Francis Eustache souligne l’importance de temps de relâche pour laisser le « réseau par défaut » du cerveau, essentiel à la mémoire, s’activer. Pour faire une pause, plusieurs moyens : sortir, rêvasser… Ou s’accorder quelques minutes de respiration avec une application comme Respirelax.

 

La bonne nouvelle, c’est que les neurones fonctionnent comme des muscles. Ainsi, plus ils seront entraînés, plus le cerveau sera résistant à la surcharge mentale !

Julie Desbiolles

Elus, DGS : je t’aime, moi non plus ! Une journée de débats le 14 septembre – En partenariat avec ETOILE

Elus, DGS : je t’aime, moi non plus ! Une journée de débats le 14 septembre Le Réseau Service Public , l’AIDL et le Réseau Etoile organisent le 14 septembre à Paris une journée qui sera est l’occasion d’analyser l’impact de cette actualité sur la gouvernance des collectivités locales et de revisiter la relation élu, DGS et cabinet autour de 3 tables rondes. A lire sur Etoile Mag Actualités.

Le Réseau Service Public , l’AIDL et le Réseau Etoile organisent  le 14 septembre à Paris une journée qui sera est l’occasion d’analyser l’impact de cette actualité sur la gouvernance des collectivités locales et de revisiter la relation élu, DGS et cabinet autour de 3 tables rondes :

Non cumul des mandats : quel impact sur les DGS ?

La loi du 14 février 2014 limitant drastiquement le cumul des mandats a pris pleinement effet et suite aux législatives et sénatoriales de 2017. Au-delà même des élus concernés, très nombreux à avoir opté pour leur mandat local, les conséquences de la fi n de ce particularisme français sont importantes avec un renforcement du poids des élus locaux aujourd’hui en pleine lumière. Autre impact fort : une nouvelle répartition des tâches entre le patron de l’exécutif local et son DGS. Cette dernière n’est pas toujours évidente avec des élus parfois sur-présents et qui se voient en chefs tout puissants.

Avec Patrice Girot, DGS de l’Agglomération Plaine – Vallée, président de l’Union Régionale Île-de-France du Syndicat national des Directeurs Généraux. Florence Feunten, maire adjointe de Toulon, en charge du personnel et de la démocratie de proximité et Chargée de mission Culture au CD du Var. Vincent Roberti,  DGS du Conseil Départemental de l’Isère.

Rôle des élus dans la gestion : jusqu’où ne pas aller ?

Une situation paradoxale ! Les élus doivent s’impliquer davantage sur certains sujets moins porteurs politiquement, au premier rang desquels la gestion du personnel, mais en même temps il ne leur faut pas se transformer en chef de service court-circuitant le DGS. Un dosage pas toujours aisé à réaliser d’autant que certains élus issus du secteur privé veulent calquer à leur collectivité le modèle de l’entreprise. Bonjour les dégâts en cas d’oubli du statut de la FPT !

Avec Patrick Jouin, maire de la Faute sur Mer, Jean Baptiste Clerc, DGS de Cornebarieu, Loïc Cauret, maire de Lamballe et président de Lamballe Terre et Mer, Héléne Guillet, DGS de la commune de Vertou, secrétaire générale adjointe du SNDGCT.

Élu,  Cabinet, DGS : deux contre un ?

Le DGS, premier fonctionnaire de la collectivité, totalement détaché de la chose politique ? L’image d’Epinal ne fonctionne plus. Pour preuve, un turn-over massif suite aux dernières municipales. Qu’ils le veuillent ou non, les DGS ont acquis une proximité particulière avec leur élu et un rôle politique croissant. La relation avec le cabinet, dont la nature est avant tout politique, peut relever de la haute-voltige. Une bonne répartition des tâches existe-t-elle pour réussir ce couple à trois ?

Avec  Jean François Lanneluc DGA Eurométropole de Strasbourg, Christian Olivérès, Observateur de l’action publique, André Hartereau, maire d’Hennebont, vice-président de Lorient Agglomération.

Hugues Perinel

Pour vous inscrire à l’événement : 

https://packcom.eolas.fr/uploads/Document/bf/WEB_CHEMIN_50683_1525878455.pdf

 

Santé et bien-être au travail : le nouveau credo des managers ?

Santé et bien-être au travail : le nouveau credo des managers ? Dans un contexte extrêmement contraint en matière de rémunération des agents, les managers publics investissent encore plus fortement la santé au travail comme levier d'innovation managériale. C'est le constat tiré de la 20e étude de l'OST publiée en juillet 2018. Article Etoile Mag Actualités

Quels leviers d’innovation managériale peuvent actionner les employeurs publics, lorsque les marges de manœuvre sur la rémunération des agents se réduisent comme peau de chagrin ? C’est à cette question que répond une récente étude dont le détail sera publié en juillet prochain par l’Observatoire social territorial de la Mutuelle nationale des territoriaux (MNT). Réalisée par six élèves administrateurs de la promotion Nina Simone de l’Institut national des études territoriales (Inet), en partenariat avec l’Association des administrateurs territoriaux de France (AATF), cette enquête menée au sein de la fonction publique territoriale montre notamment que la thématique du bien-être au travail constitue l’une des clés permettant de déverrouiller des relations sociales de plus en plus tendues. Une conclusion partagée par de nombreux experts de la sphère publique et du secteur privé qui considèrent à l’unisson que l’amélioration des conditions de travail, la prévention des risques psycho-sociaux ou encore la promotion de la santé au travail peuvent constituer de réels facteurs de motivation pour les salariés. Sans compter que la santé au travail figure aussi au rang des obligations des employeurs publics…

Nécessité d’autres leviers managériaux : fonctionnement en mode agile, formation, mobilité interne et externe

L’ancienne directrice de l’ENA Nathalie Loiseau, aujourd’hui ministre auprès du ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, chargée des Affaires européennes, souligne que lorsque «dans le contexte où le chef d’équipe ne peut ni s’appuyer sur, ni se réfugier derrière des promesses d’augmentation de rémunération, ce sont d’autres leviers qui permettent d’accompagner les talents et de nourrir leur motivation. Par exemple, les promotions internes, l’accompagnement à la mobilité interne et externe, les bilans personnalisés, l’accès à la formation, le fonctionnement en mode agile » (1).  Dans ce contexte, les encadrants sont en première ligne. Parfois mis en cause par les agents ou les organisations syndicales, ce sont eux qui ont le pouvoir de faire bouger les lignes en matière de santé et de bien-être des personnels. « La santé des salariés est d’abord l’affaire des managers, elle ne s’externalise pas », observait dès 2010,  le rapport d’Henri Lachmann, co-signé par l’actuelle ministre du Travail Muriel Pénicaud et Christian Larose.

Le bien-être au travail : un investissement sur l’avenir

Pour les auteurs de l’étude menée au sein de l’Inet, le rôle du manager de proximité s’avère essentiel dans la plupart des situations. « Il doit composer avec les nouvelles attentes des agents, en particulier celles des jeunes générations, qui sont prêts à s’investir au quotidien, mais souhaitent comprendre le sens de leur travail, en être acteurs et recevoir des retours réguliers sur leur implication, afin de contribuer à leur amélioration personnelle », indiquent notamment les futurs dirigeants de collectivités dans leur rapport. Pour eux, la recherche de nouveaux leviers d’innovation managériale doit être considérée par l’employeur public comme un véritable investissement sur l’avenir. S’appuyant sur une étude menée en 2011 par l’Agence européenne de santé et de sécurité au travail, les élèves administrateurs rappellent qu’un euro investi dans la prévention engendre un retour sur investissement pouvant aller de 1,01 à 4,81 euros. « La prévention permet ainsi de réaliser des économies en matière d’accidents du travail et d’absentéisme », remarquent aussi les élèves de l’Inet.

Emmanuelle Quémard

(1) Citation extraite de l’ouvrage « Le bien-être au travail. Pour un service public performant et bienveillant », Olivier Bachelard (Presses de l’EHESP, 2017)

« En matière de sécurité, les collectivités doivent se doter d’une capacité d’expertise »

Président de l'ANCTS (association nationale des cadres territoriaux de la sécurité (ANCTS), Cédric Renaud constate que les métiers territoriaux de la sécurité), et notamment les polices municipales, ne sont pas encore reconnus à leur juste valeur. Tout en jouant un rôle de plus en plus important dans l’organisation de la sécurité en France. Interview Etoile Mag Actualités.

Pourquoi avoir créé l’Association nationale des cadres territoriaux de la sécurité (ANCTS) ?

Avec d’autres collègues, j’avais cette idée en tête depuis une dizaine d’années. Les attentats de Charlie Hebdo au début de l’année 2015 nous ont poussés à franchir le pas. Nous nous étions rendus compte que lorsque les gouvernements souhaitaient discuter avec des représentants de la sécurité territoriale, ils avaient plusieurs interlocuteurs, sur des segments précis : police municipale, sécurité civile, prévention de la délinquance et de la radicalisation… Mais ils n’avaient pas de vision transverse auprès d’un seul interlocuteur. C’est cette vision que nous défendons avec l’ANCTS. Notre taille reste modeste, une cinquantaine de membres, mais nous sommes naturellement appelés à progresser.

Combien de recrutements dénombre-t-on, chaque année, dans la territoriale, en lien avec la problématique de la sécurité ?

Entre 300 et 400 postes environ… Nous nous heurtons à un paradoxe : beaucoup de communes, après le renouvellement de 2014, ont souhaité renforcer, voire créer, leur police municipale mais le statut de policier municipal n’a lui pas évolué, malgré le contexte de renforcement de la menace terroriste. Prenons les Conseils locaux ou intercommunaux de prévention de la délinquance. Il n’y a pas de formation particulière pour un attaché territorial. Il en fait partie parce qu’il a décidé de s’investir. Sans parler du statut du policier municipal qui, s’il a connu des évolutions positives, reste cependant peu attractif. Aujourd’hui, un Bac + 5 de 25 ans qui veut devenir directeur d’une police municipale sera refroidi en découvrant la courbe évolutive de son salaire. Or, dans ce domaine, il est indispensable que les collectivités se dotent d’une capacité d’expertise via un personnel encadrant de qualité. Nous n’avons pas de difficulté à recruter des catégories C mais du personnel encadrant.

La formation reste aussi encore insuffisante…

Depuis Charlie et surtout, pour les territoriaux, Nice, les policiers municipaux doivent être mieux formés. Mais même avec la meilleure volonté du monde, le CNFPT a du mal à suivre, notamment sur la problématique de l’armement. Sur les 22 000 policiers municipaux en France, 60 % sont armés. On arrive à 90 % si l’on intègre le taser, le flashball et autre tonfa. C’est un défi pas évident à relever de maintenir dans ce domaine un bon niveau de formation.

 

(1) Cédric Renaud est par ailleurs directeur de la police municipale et de la sécurité civile de Saint-Etienne.

L’Association nationale des cadres territoriaux de la sécurité organise son prochain congrès le 15 juin prochain à Lyon, dans les locaux de la mairie du 8e arrondissement. Renseignements ici.

 

Interview de Stéphane Menu

 

 

 

Le conseil « carrière » de Cédric Renaud
« Construire sa carrière dès le début »
« C’est une évidence de dire que les métiers de la sécurité dans la fonction publique territoriale prendront une place de plus en plus grande. Je conseille aux jeunes qui débutent de biens se renseigner sur la manière dont chaque ville défend son idée de la sécurité. D’une commune à l’autre, le vécu n’est pas le même. En attendant une meilleure fluidité dans la carrière liée à une meilleure reconnaissance du métier, les plus jeunes doivent construire d’emblée leur carrière dans le sens d’une évolution en lien avec leur motivation personnelle ».

« Pour une transversalité concrète » – Interview de Pierrick Lozé

Pierrick Lozé, DGS de la communauté d’agglomération du Mont Saint-Michel « Pour une transversalité concrète » A l’heure où le management devient la clé du succès dans le privé, les collectivités territoriales se convertissent, poussées il est vrai par un contexte permanent de réformes territoriales. Illustration à la communauté d’agglomération du Mont-Saint-Michel. A lire sur Etoile Mag Actualités.

On parle beaucoup d’entreprise libérée. Qu’en est-il des collectivités territoriales ?

Je suis Dgs de la communauté d’agglomération du Mont Saint-Michel depuis juillet 2017. J’ai été recruté pour accompagner la création de cette nouvelle collectivité, fruit de la fusion de cinq intercommunalités. Nous sommes donc encore en phase de construction et le management tient une place essentielle. Depuis 30 ans, j’ai toujours exercé des fonctions de DGS. J’ai donc suffisamment d’expérience pour confirmer qu’il n’est désormais plus possible de fonctionner en silo et que les maîtres-mots de coopération et de transversalité doivent guider notre action quotidienne. L’heure est au changement d’esprit. Je travaillais avant à Melun en Seine-et-Marne, qui compte des quartiers prioritaires de la politique de la ville à l’intérieur desquels la notion d’interculturalité a été privilégiée. Quand on ne connaît pas l’autre, on a tendance à se replier sur son pré carré, à être sensible aux sirènes communautaristes. Dans les collectivités, nous devons adopter la même attitude. J’aime bien le concept d’organisation apprenante où les intelligences multiples se nourrissent entre elles mais pas à partir du talent de l’agent et pas seulement de sa compétence.

Ce que vous dites relève souvent de la bonne intention plutôt que d’un engagement formalisé…

Vous avez raison et c’est pour cette raison que la démarche managériale doit s’attacher rigoureusement au contrat moral qu’elle induit : pas de hiérarchie, des catégories C à A, des cadres aux fonctions exécutantes, chacun doit se sentir investi dans le chantier de reconstruction de la gouvernance. Bien sûr, il serait puéril de vouloir effacer la frontière entre cadres et non-cadres. Mais la transversalité ne doit pas être ressenti comme un simple gadget, elle doit se nourrir de faits concrets.

Justement, avez-vous une stratégie en la matière ?

Le numérique a clairement changé notre relation au travail, avec des effets pervers de soumission à l’immédiateté et des mails envoyés à dix personnes pour s’abriter derrière le parapluie de la responsabilité diffuse. Ça, c’est le côté sombre d’internet. Le côté plus lumineux se dévoile quand les règles du jeu sont clairement posées : on ne peut plus faire sans les autres, on ne peut que gagner du temps avec eux. Depuis le début de l’année, j’ai instauré des rencontres DGS. Je vais rencontrer les agents sur leur lieu de travail pour discuter avec eux. La seule contrainte que j’impose, c’est de ne pas aborder des problèmes personnels et d’en rester aux seuls aspects collectifs. J’ai toujours eu peur des tours d’ivoire ».

 

Stéphane Menu

Le conseil de l’interviewé de Pierrick Lozé
« Attention au syndrome de la tour d’ivoire »
« Lorsque l’on prend un poste de direction, on peut avoir tendance à se mettre en retrait pour observer. En fait, il ne faut pas hésiter d’emblée à aller au contact des agents, à les écouter, à se montrer disponible et accessible. C’est une forme d’investissement pour l’avenir, le temps que vous passez avec les services en interne n’est jamais du temps perdu, bien au contraire, c’est l’une des voies de la réussite ».

Mobilité inter-fonction publique : ingénieurs hospitaliers et territoriaux à l’initiative

Mobilité inter-fonction publique : ingénieurs hospitaliers et territoriaux à l'initiative Plusieurs associations et syndicats d'ingénieurs hospitaliers et territoriaux, dans un courrier adressé à Gérald Darmanin, ministre de l'Action et des comptes publics, plaident pour un statut commun afin de favoriser la mobilité entre ces deux versants de la fonction publique. A lire sur Etoile Mag Actualités

Et si l’initiative prise par le Syndicat des Manageurs Publics de Santé (SMPS) faisait tâche d’huile au sein de la fonction publique ?  En proposant au gouvernement la création d’un statut commun pour les ingénieurs hospitaliers et territoriaux, cette organisation affiliée à l’UNSA a incontestablement ouvert une brèche dans laquelle plusieurs associations d’ingénieurs se sont aussitôt engouffrées. Dans un courrier adressé le 15 mars 2018 à Gérald Darmanin, ministre de l’Action et des comptes publics, les présidents de cinq associations d’ingénieurs territoriaux et hospitaliers et les responsables du SMPS et de l’UNSA Territoriaux ont déroulé un argumentaire juridique qui pourrait bien faire bouger les lignes administratives sur le dossier essentiel de la mobilité entre les différents versants de la fonction publique.

Lever les freins

Dans cette lettre, les signataires demandent que les ingénieurs des hôpitaux et ceux des collectivités bénéficient d’une disposition introduite par l’ordonnance du 13 avril 2017 portant diverses mesures relatives à la mobilité dans la fonction publique. Fondée sur la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, cette ordonnance lève, en effet, plusieurs freins à la mobilité des agents publics. Elle permet notamment de régir par des dispositions statutaires communes « des corps et cadres d’emplois de fonctionnaires relevant de la même catégorie et d’au moins deux des trois versants de la fonction publique ».

Des statuts historiquement comparables

« Nos décrets statutaires sont historiquement comparables, le décret n°91-868 du 5 septembre 1991 portant statut particulier des ingénieurs de la fonction publique hospitalière ayant été créé sur la base du décret n°90-126 du 9 février 1990 portant statut particulier du cadre d’emplois des ingénieurs territoriaux. Ils ont suivi les mêmes évolutions, avec parfois un délai de transposition générateur d’iniquité et de freins à la mobilité » précisent notamment les signataires du courrier.

Estimant que « la mobilité est un levier essentiel de modernisation de la fonction publique », les représentants de l’ingénierie hospitalière et territoriale ajoutent que la mise en œuvre de décrets statutaires communs permettrait de transposer la dernière réforme des cadres d’emploi des ingénieurs territoriaux de mars 2016 aux ingénieurs hospitaliers et aux ingénieurs de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris. Selon eux, « les spécificités liées aux particularités respectives d’exercice pourraient être maintenues dans des décrets particuliers ».

A priori, le raisonnement des signataires de la lettre à Gérald Darmanin semble implacable. Le gouvernement partagera-t-il les mêmes conclusions que les ingénieurs hospitaliers et territoriaux ? Les différents axes de modernisation de la fonction publique du programme Action Publique 2022 traduisent d’ores et déjà  la volonté gouvernementale de favoriser une plus grande mobilité des agents entre les trois versants, mais aussi vers le secteur privé…

Emmanuelle Quémard

« Améliorer à la fois l’accueil et les conditions de travail des agents » – Interview de Christian Sautier

« Améliorer à la fois l’accueil et les conditions de travail des agents » Distinguée par le trophée Afnor de la relation aux usagers, la ville d’Auxerre a fait (aussi) de l’amélioration de l’accueil public un exercice audacieux de management interne. Et les 40 agents impliqués apprécient ce nouveau cadre de travail. A lire sur Etoile Mag Actualités.

Vous avez reçu fin 2017 le trophée Afnor de la relation aux usagers. En quoi cette distinction est-elle révélatrice des efforts réalisés en interne pour mieux accueillir le public ?

Reprenez l’intitulé de mon poste ! Directeur de la communication mais aussi de l’accueil public, qu’il soit physique, dématérialisé ou téléphonique. Nous avons créé un guichet unique, puisqu’il s’agissait d’un engagement de campagne du maire (Ndlr, Guy Férez). Cette dynamique a été rendue possible par Claude Sauvé, Dgs de la ville lors du premier mandat du maire et qui a été rappelé au même poste pour le troisième mandat de ce dernier. Entre temps, il avait mis en place à Pessac (Gironde) un dispositif similaire à celui d’Auxerre. L’objectif politique central et donc la commande qui nous a été faite était simple : repartir de l’usager. Ce dernier change, paie en ligne ses achats, intervient sur les réseaux sociaux. Il revenait à l’administration publique de se mettre en phase avec lui. Mais dans le cadre d’un gagnant-gagnant avec le personnel…

C’est-à-dire ?

Le message que nous avons passé aux agents était clair : si la relation aux usagers doit s’améliorer, vos conditions de travail doivent suivre… De la réfection des locaux, avec un gain de place et donc de fonctionnalité jusqu’au recours à une consultante Afnor qui, une fois par mois pendant un an et demi, est venue nous conseiller sur le meilleur moyen de décrocher le label « Qualiville » de l’organisme certificateur, nous avons mis tout en œuvre pour y arriver. Par exemple, un des critères était qu’un usager en quête d’information ne devait pas attendre plus d’un quart d’heure pour l’obtenir. 95 % des demandes entrent désormais dans cette fourchette. Ensuite, nous avons structuré cet accueil comme un service à part entière, composé d’une quarantaine d’agents, avec des détachements d’agents venus d’autres services sur des domaines plus experts. Exemple : une demande généraliste arrive, la majorité des agents peut y répondre. Si elle est plus pointue, un agent du funéraire, des finances, de l’urbanisme, etc., prend le relais. Ce service a donc été conçu physiquement comme complètement transverse.

Comment, en interne, les agents ont été formés ?

Il a fallu admettre et intégrer la double détente de l’accueil : le front et le back office… Le traitement administratif, en back office, est tout aussi important. Quand on s’engage à fournir au notaire les renseignements qu’il demande en moins d’une semaine pour certifier une opération immobilière, le travail administratif doit être aussi performant que la qualité de l’accueil. Il ne sert à rien de bien accueillir pour mal servir. Nous avons aussi élargi les plages horaires. Le mercredi, le public est reçu de 10h30 à 19h, ce qui correspond mieux au vécu professionnel des citoyens. Enfin, nous avons mis au point des fiches de procédure, 45 précisément, pour que toutes les réponses soient uniformément adaptées aux demandes. Dernier point capital, nous avons travaillé sur les prestations « famille » sur le site internet. En 2014, 3 % des familles payaient en ligne les prestations familiales (crèches, activités périscolaires, etc.). Nous sommes passés à 60 % des prestations payées en ligne. Si nous perdons moins de temps à recevoir les gens pour ce type de services, nous en aurons plus pour être à l’écoute de cas plus difficiles. C’est une question de bon sens.

Stéphane Menu

Le conseil « carrière » de Christian Sautier

« Faire partager les valeurs du service public »

« A tous mes collègues encadrants, je les invite à prendre le temps de partager en interne les valeurs du service public. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, les agents y sont très sensibles et aiment s’engager dans leur métier pour rendre… service public ».

Les Français favorables à une réforme de la fonction publique mais partagés sur la réduction du nombre de fonctionnaires

Les Français favorables à une réforme de la fonction publique mais partagés sur la réduction du nombre de fonctionnaires. Un sondage Harris Interactive pour LCP livre des enseignements inédits sur la manière dont les Français perçoivent les réformes annoncées dans la fonction publique notamment en matière de retraite, de rémunération, d'effectifs et de mobilité public-privé. A lire sur Etoile Mag Actualités.

Quel regard portent les Français sur la fonction publique et sur les fonctionnaires ? Comment jugent-ils le projet de réforme annoncé par le Premier ministre le 1er février 2018 lors du premier comité interministériel de la  transformation publique ? C’est à ces deux questions que répond un récent sondage signé Harris Interactive pour LCP (La Chaîne Parlementaire). Premier enseignement de cette intéressante enquête réalisée en ligne les 4 et 5 avril 2018 auprès d’un échantillon de 1063 personnes : la sphère publique continue d’avoir globalement bonne presse, malgré les tensions sociales apparues ces dernières semaines. Une nette majorité de répondants déclarent, en effet, avoir une opinion « plutôt positive » à l’égard de la fonction publique (64%), des services publics (63%) et des fonctionnaires (62%). Reste que l’image de la fonction publique apparaît nettement plus clivée selon que les personnes interrogées sont issues du secteur privé ou du secteur public. Ainsi, seulement 55% des Français travaillant dans le privé déclarent avoir une « bonne opinion » de la fonction publique, une proportion qui atteint 81% chez ceux qui occupent un emploi dans le secteur public. Même hiatus dans la manière d’apprécier les fonctionnaires. Dans le privé, 52% des répondants affirment en avoir une bonne opinion, alors que dans le public, ce pourcentage grimpe à 82%.

Éternel clivage public/privé

Ce clivage se retrouve lorsqu’il s’agit de qualifier la fonction publique. Pour 74% des Français exerçant leur activité professionnelle dans le privé, elle est « trop coûteuse » et les agents publics sont perçus comme des « privilégiés ». Perception radicalement différente chez les répondants occupant un emploi public, puisque 80% d’entre eux jugent la fonction publique « compétente » (contre 53% chez les actifs du privé), 74% la trouvent « soucieuse de l’intérêt général » (seulement 45% partagent cette opinion dans le privé), tandis que 73% des sondés estiment qu’elle « sait répondre aux besoins des usagers » (44% pour ceux du privé). Concernant « l’efficacité » de la fonction publique, elle est reconnue par 62% des Français travaillant dans le public, alors qu’à peine 34% des personnes évoluant dans le privé lui reconnaissent cette qualité.

Face au projet de réforme de la fonction publique porté par le gouvernement, les personnes interrogées par Harris Interactive se déclarent spontanément favorables aux chantiers mis à l’ordre du jour par l’exécutif. Une majorité considère que la réforme est « bonne » et « nécessaire ». Mais là encore, la perception diverge selon l’appartenance professionnelle des sondés. Dans le privé, on met en avant la « nécessité » de cette réforme, en pointant les supposés « privilèges » des fonctionnaires. A l’inverse, les actifs du secteur public jugent d’abord les modifications à venir à l’aune de la suppression des moyens et de l’impact sur les salaires et les retraites.

Consensus sur la mobilité

Parmi les différents items de la réforme testés par Harris, certains recueillent un assentiment assez net chez les Français. La mobilité entre fonction publique et secteur privé au cours d’une carrière apparaît notamment comme un sujet faisant consensus dans le privé comme dans le public. Globalement, 84% des répondants se déclarent favorables à cette mesure.

D’autres points de la réforme sont plus diversement appréciés. Les sondés appartenant au secteur privé se montrent, par exemple, les plus favorables (82%) à l’alignement des régimes de retraites de la fonction publique sur ceux du privé. Il en va de même pour le développement du recrutement de contractuels dans la fonction publique (75%), la rémunération au mérite pour les fonctionnaires (74%) et la fin de « l’emploi à vie » (74%). Autant de mesures qui provoquent plus de réticences dans le public, même si dans cette sphère professionnelle on approuve massivement (81%) le principe d’une augmentation de la rémunération des fonctionnaires. Enfin, les Français apparaissent très divisés sur le principe de la réduction du nombre de fonctionnaires, seulement 54% d’entre eux déclarant y être favorables. D’ailleurs, quel que soit le secteur d’appartenance des personnes interrogées, certaines catégories d’agents publics apparaissent comme devant être épargnées par les compressions d’effectifs :  les agents hospitaliers (86% des Français estimant qu’il en faudrait plus), les policiers (71%) et les enseignants (66%).

Emmanuelle Quémard

« La mobilité devient un élément central de la carrière d’un agent » dans la fonction publique

Interview de Marianne Estève, consultante, formatrice et coach. Fonction publique : «La mobilité devient un élément central de la carrière d’un agent». Etoile Mag Actualités

Pouvez-vous vous présenter ?

Je travaille essentiellement dans le secteur public, rarement avec le privé. Je suis devenue formatrice… en passant par le secteur culturel, plus précisément par le chant lyrique que j’ai exercé durant quelques années. Disposant d’une maîtrise de droit public et d’un DEA de sociologie politique, j’ai pris le parti de me former… à la formation pour adulte à travers une certification référencée de 9 mois. C’est ainsi que j’ai été amenée à travailler de plus en plus avec le secteur public. Ma mission ? Repérer les atouts chez les agents, potentialiser ce qu’ils ne voient pas tout de suite au quotidien, révéler la part cachée du talent de chacun, etc.

Autre spécificité : vous accompagnez les agents dans la préparation des concours…

On me sollicite dans le cadre de la préparation des concours dans les trois fonctions publiques. Pour franchir ce cap, certains ont besoin d’être rassurés, de bien gérer leur stress, leurs émotions. Ils n’osent pas s’avouer qu’ils ont quelques difficultés en la matière. Il faut donc les accompagner sur la durée parce que les concours, notamment lorsqu’ils abordent la partie orale, sont exigeants et peuvent se jouer sur des détails. Il m’arrive aussi de former les jurys de recrutement des administrateurs territoriaux, pour les aider à mieux affiner leurs critères de recrutement. Enfin, je suis sollicitée pour établir avec les directions des ressources humaines les plans de formation des agents.

Dans ce contexte de réforme, être en capacité de mobilité devient-il essentiel ?

La mobilité devient un élément central de la carrière d’un agent. Dans un contexte de réforme durable, il faut les préparer. Si la fonction publique d’Etat a pris les devants, c’est moins le cas de la Territoriale, pour des raisons financières, ai-je cru comprendre. Pourtant, le recours à un conseil en mobilité n’a jamais été aussi urgent qu’en cette période. Je crains que le changement de paradigme managérial dans les collectivités se fasse sans que les agents y soient suffisamment associés. Le risque d’un décrochage est réel.

Interview de Stéphane Menu

 

Le conseil « carrière » de Marianne Estève
« Découvrir d’autres cultures d’entreprise »
« Pour se préparer à la mobilité, il faut avoir la curiosité d’aller voir ce qui se passe ailleurs,
pour partager avec d’autres agents des pratiques qui pourraient avoir un effet bénéfique pour vous.
Vivre en vase clôt aura naturellement un jour ou l’autre des conséquences néfastes sur votre carrière ».