« Il y a un déni de réalité sur l’ouverture sociale de la fonction publique » – Interview de Damien Zaversnik

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Présentez-nous La Cordée…

 

L’association est née fin 2016. Elle compte une cinquantaine d’adhérents et une trentaine de bénévoles. L’objectif est de sensibiliser les populations éloignées de la fonction publique aux métiers qu’offre cette dernière. Dans les quartiers de la politique de la ville, beaucoup de personnes imaginent que les postes d’encadrants dans la fonction publique ne sont pas faits pour eux.

En Seine-Saint-Denis, beaucoup de postes publiés par les collectivités territoriales ne trouvent pas preneurs. C’est dommage quand on sait que le chômage atteint 20 % dans ce département ! Nous menons donc ce type de sensibilisation, pour rappeler aux jeunes qu’il existe des classes préparatoires disposées à accueillir des boursiers. Désormais, cette ouverture vers la diversité sociale est bien ancrée dans les grandes écoles. Certaines classes préparatoires ont même du mal à accueillir tout le monde. Nous souhaitons un renforcement de ce dispositif.

 

Le paradoxe absolu, c’est que l’Etat donne beaucoup de leçons en la matière tout en étant moins exemplaire que le privé…

 

On a très peu de données. La haute fonction publique est presque confondue avec une caste inatteignable, une haute bourgeoisie éloignée des réalités. Les entreprises sont très analysées sur ce sujet. Dans le public, seul le rapport de Yannick L’Horty donne des pistes. Dans le cadre d’Action Publique 2022, nous avons porté une contribution pour que la fonction publique s’interroge enfin de façon objective sur les pratiques discriminatoires qu’elle ne combat pas en son sein. Nous vivons sur un mensonge, celui de laisser croire que le concours garantit l’égal accès à la fonction publique. Il y a un déni de réalité sur l’ouverture sociale de la fonction publique. Les concours, tels qu’ils sont construits, ont tendance à survaloriser une qualification scolaire qui ne fait que renforcer les inégalités.

 

Où se situe le problème ? Les administrations discriminent-elles volontairement ?

 

Non, elles ne se posent souvent pas la question, tout simplement, de la façon dont elles managent ou elles recrutent. Tout le monde sait aujourd’hui que les aptitudes d’un candidat doivent être autant prises en compte que son cursus scolaire. Étonnamment, pas ou peu dans la fonction publique. Prendre mieux en compte les aptitudes permet de diversifier son recrutement et de sortir des préjugés sur les candidats issus de quartiers défavorisés. C’est pour cette raison que nous demandons que les administrations de plus de 1 000 agents soient obligatoirement soumises à une labellisation égalité et diversité, qui a au moins le mérite de faire prendre conscience aux cadres de la réalité du problème.

 

Stéphane Menu

 

Pour aller plus loin, le site de l’association

 

Le conseil de l’interviewé
« Activer la citoyenneté active des agents »

« Dans notre association, nos adhérents ont été confrontés aux discriminations, parfois de façon explicite et grave. Il faut lutter tous les jours contre ce fléau. Mais nous n’y arriverons pas sans la mobilisation des agents, dans une forme de citoyenneté active. Il suffit de décréter de dire non à des choses qui n’ont pas lieu d’exister ».

 

Fonctionner en réseau : la réussite du Réseau Service Public

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Journalistes expérimentés et fins connaisseurs du service public, spécialistes du marketing et du développement, professionnels de la production visuelle, ils mettent leur expertise et leur carnet d’adresses (élus locaux, fonctionnaires, associations professionnelles, experts, consultants…) au service des événements organisés par les organisations professionnelles, les collectivités, les services de l’Etat, le secteur hospitalier, le secteur privé non lucratif et les entreprises publiques et privées, dans le domaine de la gestion publique.

Du montage à l’animation des débats, de la captation vidéo aux actes valorisant les échanges et interventions, des études et des enquêtes qui peuvent les étayer, chaque prestation est importante et ne souffre ni l’amateurisme, ni la méconnaissance des sujets, comme on le voit  souvent dans des débats où l’animateur se limite à «passer les plats», ni l’absence de travail préparatoire.

 

Agilité et diversité

 

Il n’existe pas vraiment de hiérarchie dans le Réseau Service public , mais une dynamique insufflée par Hugues Perinel , à l’origine de cette idée . Dès qu’une proposition arrive ou qu’un projet les intéresse , la première question est de savoir qui est la personne la plus compétente dans le réseau pour y répondre ,  puis ce qui lui manque et que les autres peuvent apporter ( contacts , réflexion sur le contenu , benchmarking , logistique ..etc). Il suffit le plus souvent de quelques jours pour construire une offre .

Mais leur richesse est avant tout  leur diversité de compétences et de savoir-faire, la variété de leurs  propres réseaux et leur capacité à être, bien plus qu’un simple prestataire, une véritable force de proposition !

 

Concevoir, animer mais aussi… restituer

 

C’est une partie que l’on laisse parfois un peu de côté, que l’on bricole en interne et pourtant lorsque la richesse des débats, la pertinence des interventions, les moments forts d’une manifestation sont mis en avant par des professionnels de l ‘écriture ou de l’image, de leur mise en forme et de leur diffusion, c’est une seconde vie qui commence et qui valorise le travail et l’énergie que les organisateurs ont consacré à tel ou tel événement.

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Mieux anticiper l’évolution des métiers et développer les compétences des agents

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Fractures territoriales, inégalités sociales, mutations numériques et environnementales, tous les défis mis sur le devant de la scène par la crise des « gilets jaunes » devraient constituer les enjeux majeurs des politiques publiques conduites au cours des prochaines années. Dans ce contexte, quel rôle seront amenés à jouer les 5,5 millions d’agents publics ? Comment ce réseau de femmes et d’hommes œuvrant pour l’intérêt général va-t-il pouvoir renforcer la cohésion et la justice sociale dans les territoires ? Quels moyens devraient être mobilisés en faveur des services publics dans une conjoncture marquée par des économies budgétaires ?

Autant de questions sur lesquelles le Conseil économique, social et environnemental (CESE) était invité à réfléchir dans le cadre d’une mission confiée par le Premier ministre. Une réflexion menée en parallèle de la concertation Action publique 2022 initiée depuis le mois de février 2018 par le gouvernement. L’avis adopté le 11 décembre dernier par l’assemblée consultative apporte des premières réponses alors qu’un projet de loi visant à réformer la fonction publique est attendu au 1er semestre 2019.

 

« Plan pluriannuel sur la formation continue »

 

Parmi ses préconisations, le CESE recommande d’abord de « définir et renforcer le dispositif de gouvernance de la fonction publique ». Les conseillers du Palais d’Iéna pointent le fait que les trois fonctions publiques disposent actuellement de dispositifs de pilotage distincts ; la DGAFP intervient surtout sur des aspects réglementaires ou de suivi statistique. Pour rendre plus efficace la gestion des ressources humaines, le CESE juge indispensable la mise en place d’une nouvelle gouvernance. « Rattachée à la DGAFP et coordonnant les trois versants, cette nouvelle structure devrait être dotée de trois missions : le développement des compétences et qualifications professionnelles, la définition des axes de formation continue des personnels et l’anticipation de l’évolution des métiers », propose le Conseil. Dans son avis, le CESE suggère par ailleurs de prévoir, dans le cadre du prochain projet de loi, « l’élaboration d’un plan pluriannuel sur la formation continue ».

 

Consultation régionale

 

Dans le même temps, l’assemblée consultative préconise d’engager dans chaque région une consultation sur l’évolution des besoins en matière d’emploi public. Objectif : « mieux adapter la répartition des métiers de la fonction publique aux territoires ». Le Conseil recommande également d’améliorer la couverture de la fonction RH, notamment pour les populations de fonctionnaires qui en bénéficient peu, en mettant en place un réseau de conseillers RH de proximité dans l’Éducation nationale.

Les membres du CESE souhaitent d’autre part que des dispositions soient prises pour renforcer la formation, « notamment en modifiant les programmes de formation initiale des écoles de la fonction publique pour assurer une formation plus en ligne avec les besoins de polyvalence des personnels ». En outre, le CESE appelle à « garantir l’accès à la formation continue des personnels contractuels » et insiste sur la nécessité de « mettre en œuvre une mission publique sur la collecte et l’usage des données numériques ». Le Conseil se prononce en particulier pour la création d’un corps d’ingénieurs A+ des systèmes d’information et de communication de l’Etat.

 

Emmanuelle Quémard

« Entre Paris-Dauphine et le secteur public, nous avons beaucoup à faire » – Interview de Marie-Hélène Caitucoli

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La House of Public Affairs a été créée en janvier 2017 par l’université Paris-Dauphine. De quoi s’agit-il ?

 

Paris-Dauphine, dont la réputation s’est faite autour des enseignements sur le management et l’économie, travaille plus avec le privé qu’avec le secteur public. Mais, dans le contexte de profondes mutations que vivent nos sociétés, comme les nouvelles technologies, le big data, la transition écologique ou encore l’accroissement de la pauvreté, nos centres de recherche intègrent de plus en plus la part du public dans l’adaptation de nos sociétés à ces nouveaux défis. Près de 20 % des thèses des 20 dernières années publiées par nos enseignants-chercheurs tournent autour de problématiques concernant directement le secteur public. Il nous est apparu évident que la recherche pluridisciplinaire et les diverses formations de l’université pouvaient apporter leur pierre à l’édifice de construction du monde qui vient. En fait, entre Paris-Dauphine et le secteur public, nous avons beaucoup à faire.

 

En votre qualité de chargée de mission de la House, quels sont vos objectifs ?

 

Rendre visibles et de développer toutes les initiatives, au niveau de la recherche et des formations, liées aux affaires publiques à Paris-Dauphine, en établissant de nombreux ponts avec la sphère publique, à savoir des colloques conjoints, des éclairages des politiques publiques par la recherche, des nouveaux terrains de recherche pour les chercheurs, de la formation continue des décideurs publics, etc. Dans tous nos centres de recherche, des liens existent avec le public. Le centre des mathématiques a développé des systèmes probabilistes avec le secteur public, le laboratoire d’économie planche sur l’évaluation du secteur public et bien sûr, le centre de management s’inspire de ce qui se fait dans le public. Il fallait tout simplement mettre cette richesse en évidence. Par ailleurs, nous proposons des formations initiales et continues qui peuvent intéresser les cadres dans les fonctions publiques.

 

Comment la fonction publique peut-elle travailler avec vous ?

 

Nous ne sommes pas un centre de recherche. Nous créons les conditions pour que naissent des synergies et des rapprochements. Si certaines collectivités territoriales veulent travailler avec nos chercheurs, nous organisons une réunion, nous étalonnons les projets. En fait, nous ne faisons qu’extérioriser ce qui se passait dans nos centres de recherche, pour apporter une plus-value aux trois fonctions publiques. Nous travaillons par exemple avec l’Institut de la gestion publique et du développement économique (IGPDE), qui est l’opérateur de formation permanente du ministère de l’Économie et des Finances et du ministère de l’Action et des Comptes publics. Nous publions ensemble une revue, « Action publique, Recherche et pratiques ». Ce sont des outils qui permettent de donner une visibilité concrète à nos centres de recherche sur d’autres aires de diffusion.

 

Stéphane Menu

L’ANDRHDT veut moins de cloisonnement pour booster l’employabilité

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« L’employabilité est notre capacité à maintenir ou faire acquérir des compétences à un agent pour qu’il exerce un nouveau métier ou une nouvelle forme de travail », résume Isabelle Debest, directrice des ressources humaines (DRH) au Conseil Départemental du Gers. Définition simple, sujet compliqué : entre les nouveaux métiers et ceux qui disparaissent, difficile pour les DRH de conserver l’employabilité de leurs agents… Pourtant nécessaire dans un contexte de contrainte budgétaire, explique Isabelle Debest. « Aujourd’hui, on a des postes qui se spécialisent, et pas la capacité à y répondre en interne. Mon quotidien, c’est essayer d’y répondre malgré tout… »

Pour acquérir des compétences, évidemment, des outils existent : Isabelle Debest cite la formation, les conseillers en évolution professionnelle (CEP)… Mais les ateliers du dernier Congrès annuel de l’Association Nationale des DRH des Territoires (ANDRHDT) ont fait émerger une solution peu exploitée : le passage par le privé pour que les agents puissent « aller chercher de la compétence sur l’extérieur ». Cette idée fait cependant face à un obstacle de taille : le cloisonnement. Comment faire tomber la cloison ?

 

Le statut, un mur administratif

 

Pour Isabelle Debest, le premier obstacle, c’est le statut de fonctionnaire : « Aujourd’hui, en terme de carrière, le statut permet de reconnaître à minima l’expérience professionnelle [dans le privé] » explique-t-elle. En d’autres termes : même si « il y a des avancées » depuis quelques années, son expérience quotidienne montre que la crainte d’une discontinuité dans leur carrière subsiste chez les agents.

 

DRH : se rassembler et communiquer

 

Ainsi, les DRH présents au congrès misent sur deux axes d’action. Le premier, c’est l’idée d’un MEDEF local (explorée ici) qui rassemblerait DRH des trois fonctions publiques, et du privé. L’objectif serait tout simplement de mieux travailler ensemble : surveiller les évolutions du marché de l’emploi, croiser les besoins, créer des passerelles… Le second se passe en interne, avec un vrai travail auprès des agents qui doivent « se rendent acteurs de leur vie professionnelle : on met des dispositifs en œuvre, mais les agents doivent construire leur projet », explique Isabelle Debest.

Pour elle, la clé, c’est la communication : à la fois auprès des agents, pour « développer une culture de la mobilité », mais aussi de manière plus large, en « travaillant sur l’attractivité de l’emploi territorial ».

 

« On est dans le monde du travail, qu’il soit public ou privé »

 

Pour Isabelle Debest, les passerelles public-privé seraient une chance pour tous : « Même si on est régis par des statuts différents, on a des gens qui travaillent dans les même secteurs d’activité. C’est bien que les agents ne soient pas enfermés par un statut, qu’ils puissent avoir une mobilité quand un poste les intéresse dans le privé ». Elle conclut, pragmatique : « On est dans le monde du travail, qu’il soit public ou privé ».

 

Julie Desbiolles

Quelles sont les motivations des jeunes candidats aux concours ?

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Qui sont les jeunes qui participent aux concours de la fonction publique et quelles sont leurs motivations ? C’est la question à laquelle tente de répondre une étude réalisée par la DGAFP dans le cadre du Rapport 2018 sur l’état de la fonction publique.

Réalisée par Claire Hagège et Margot Thuilliez, cette enquête montre d’abord que 10,5 % des jeunes ayant quitté le système éducatif au cours ou à l’issue de l’année scolaire 2012-2013 déclarent trois ans plus tard avoir participé à au moins un concours permettant de devenir fonctionnaire. Parmi les jeunes qui souhaitent embrasser une carrière publique, les plus nombreux (6,5 % de l’ensemble des candidats) tentent leur chance dans la fonction publique de l’État. Les deux autres versants de la fonction publique paraissent moins attractifs : 2,5% des candidats pour la FPH et 2,2% pour la FPT.

 

Deux fois plus de femmes

 

Plus de la moitié des candidats (56 %), et même trois quarts de ceux qui souhaitent intégrer la FPT, ne présentent qu’un seul concours. « Parmi ceux qui en passent plusieurs, quatre sur dix présentent uniquement des concours permettant d’intégrer le même corps ou cadre d’emplois, et peu candidatent dans plusieurs versants », soulignent les responsables de l’étude.

Le profil des candidats permet de dessiner un portrait-robot de ceux qui aspirent à devenir fonctionnaires. Il s’agit essentiellement de femmes qui sont deux fois plus nombreuses que les hommes à passer des concours. Sans oublier les jeunes diplômés : 19,8 % des candidats sont détenteurs d’un bac +5 et 30,4 % sont titulaires d’un doctorat. Les plus nombreux à candidater sont d’ailleurs les jeunes formés dans une discipline générale (sciences humaines et droit, lettres et arts, mathématiques et sciences) ou ceux qui ont une expérience dans les services aux personnes et à la collectivité. A l’inverse, on trouve peu de candidats parmi les jeunes formés aux métiers de la production.

 

« Vocation pour le métier »

 

L’étude montre que les candidats aux concours sont plutôt originaires de villes-centres, d’aires urbaines de taille moyenne ou d’outre-mer. Les jeunes issus de l’immigration se présentent moins souvent aux concours (-3% par rapport à la moyenne des candidats). Le plus fort contingent de candidat provient d’un milieu social plus favorisé (leurs parents présentent un niveau allant de bac +2 à bac +4 (13,2 %)) ou le couple parental exerce des professions de cadre (15,2 %).

« L’intérêt du métier est la première motivation pour passer un concours de la fonction publique », observent Claire Hagège et Margot Thuilliez en soulignant qu’elle est mise en avant par plus de neuf candidats sur dix. Les deux auteures de l’étude classent les candidats en fonction de leurs motivations. Ils sont 51% à affirmer avoir une « vocation pour le métier ».

Dans ce groupe se rassemblent le plus grand nombre de ceux qui aspirent à devenir enseignants et les jeunes travaillant déjà dans la fonction publique. Un second panel est formé par 37% des candidats mettant en avant un « intérêt général pour la fonction publique ». Il s’agit essentiellement de postulants aux concours de catégorie B et C, certains d’entre eux ayant avec un niveau bac à bac +4. Enfin, un contingent de 12% des candidats regroupe des jeunes reconnaissant se destiner « par défaut » à une carrière publique. Il s’agit pour l’essentiel de postulants aux concours de catégorie C, souvent moins diplômés, principalement issus de familles précaires. D’ailleurs, certains occupaient déjà un poste de contractuel en CDD.

 

Équilibre entre vie privée et vie professionnelle

 

L’étude met également en avant les objectifs personnels des aspirants à un métier dans la fonction publique. L’équilibre entre vie professionnelle et vie privée apparaît comme un critère important, notamment pour les candidats à l’enseignement. L’exercice d’un travail utile à la société est également cité comme source de motivation. Tandis que la rémunération apparaît comme un facteur moins important dans le désir de devenir fonctionnaire. L’étude révèle aussi que les femmes accordent plus d’importance que les hommes à l’intérêt du poste, en particulier les candidates de la FPT.

 

 

Emmanuelle Quémard

Rentabilité dans la fonction publique : l’ANDRHDT veut en finir avec un tabou

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Lors de l’atelier « Comment maintenir rentabilité et motivation dans l’exécution de l’action publique ? » du dernier Congrès annuel de l’Association Nationale des DRH des Territoires, les DRH sont revenus aux fondamentaux : Qu’est-ce que la rentabilité ?

Si en économie privée, la rentabilité mesure le rapport entre un investissement et un gain financier, les DRH de la fonction publique la voient un peu différemment. Pour eux, l’investissement est humain et matériel, et le gain peut être non seulement financier, mais aussi environnemental et sociétal.

 

« La rentabilité ne doit pas être perçue comme un coût »

 

« La fonction publique a un coût, mais le gain en terme de richesse nationale n’est pas quantifié. Quand on accueille des publics difficiles, quand on nettoie des rues, évidemment, ça a un coût… Mais si ce n’était pas fait, que se passerait-il ? », explique Patrick Coroyer, président de l’ANDRHDT.

Jean-Patrick Serres, DRH au Conseil départemental du Puy de Dôme et animateur de cet atelier, explicite : « La rentabilité ne doit pas être perçue seulement comme un coût. Elle doit être perçue comme la juste adéquation entre le coût du service (et donc de la ressource humaine), la richesse produite par ce fonctionnaire, et l’efficacité du service rendu ».

Cependant, il estime qu’il manque actuellement des données pour résoudre l’équation : « Aujourd’hui, la difficulté est de mesurer cela, car nous n’avons pas les instruments pour le faire, ou alors des difficultés à accepter de le faire », explique-t-il.

 

Le management, enjeu central pour la rentabilité

 

Pour Jean-Patrick Serres, une idée principale ressort de cet atelier : travailler sur la rentabilité, c’est surtout travailler sur la motivation des agents. Et pour ça, les DRH disposent de plusieurs leviers : la formation, le recrutement, la rémunération… Mais surtout, de bons managers, qui peuvent aider les agents à saisir le sens et les objectifs de leur action.

Or, ils constatent un vrai problème dans le recrutement des managers, qui le deviennent trop souvent pour des questions de grade. Mais pour Jean-Patrick Serres « le management, ça s’apprend, mais il y a aussi une part de capacité. On peut faire des formations, mais on ne sera pas forcément un bon manager »… Tout en précisant : « ça ne veut pas dire qu’on est mauvais. Mais devenir manager ne doit pas être vécu comme une récompense ! »

 

La rentabilité dans la fonction publique existe déjà

 

L’atelier aura atteint son objectif : non pas résoudre une question… Mais en poser plein d’autres ! Pour Jean-Patrick Serres, c’est là l’essentiel : parler car la rentabilité est de toute manière déjà à l’œuvre dans la fonction publique : « Quand les élus décident de fermer un service ou qu’on la transfère par délégation, indirectement, la question de la rentabilité est posée, même si ce n’est pas dit comme ça ». Dans ce contexte, nommer les choses, c’est déjà les maîtriser un peu mieux…

 

Julie Desbiolles

Les territoriaux font un « travail utile » selon 79% des Français

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C’est une étude qui remet l’église au centre du village ! Alors que le projet de loi de réforme de la fonction publique devrait être adopté au cours du premier semestre 2019, le sondage que publie la Casden Banque Populaire tombe à pic pour rappeler l’attachement des Français à leurs services publics et à ceux qui l’incarnent. Certes, l’enquête réalisée les 6 et 7 novembre 2018 par BVA auprès d’un échantillon de 1094 personnes ne concerne que la fonction publique territoriale, mais les enseignements que l’on peut en tirer battent en brèche bien des idées reçues. Notamment sur le prétendu désamour entre les citoyens et les fonctionnaires. Interrogés sur l’image qu’ils ont des agents des collectivités locales, les Français répondent sans ambiguïté (64%) qu’ils ont une bonne opinion des personnels territoriaux. Seuls 35% des répondants manifestent une défiance à l’égard des agents des collectivités et ils ne sont que 4% à en avoir une très mauvaise opinion.

 

Les territoriaux bénéficient de bonnes conditions de travail

 

Le travail des agents de la territoriale très majoritairement apprécié des usagers des services publics de proximité est une autre conclusion de ce sondage. Pour 79% des Français, il s’agit, en effet, d’un travail utile et ils sont 68% à considérer que les employés de la FPT contribuent au maintien du lien social sur les territoires. Dans l’ensemble, les Français trouvent que les agents des collectivités locales bénéficient plutôt de bonnes conditions de travail (69%) et qu’ils sont compétents (67%). En revanche, ils ne sont que 40% à penser que les territoriaux sont passionnés par leur mission d’intérêt général.

 

Les qualités des territoriaux : proximité, équité, écoute…

 

Invités à citer les principales qualités des agents des collectivités, les répondants indiquent spontanément leur proximité (55%), leur équité (32%), leur écoute (29%) et leur professionnalisme (28%). Ils sont, par ailleurs, 25% à affirmer que la disponibilité est l’une de leur principale caractéristique. Néanmoins, quelques critiques sont implicitement formulées à travers les réponses au questionnaire élaboré par la Casden. Il apparaît notamment que seulement 7% des personnes interrogées par BVA jugent performant le travail des agents. Ils ne sont pas davantage à trouver les territoriaux dynamiques et sont encore moins nombreux à leur accorder une capacité à innover (4%).

Autre élément important dans le contexte de la concertation que conduit actuellement le gouvernement : une nette majorité des administrés (57%) ne souhaiterait pas voir transférées au privé certaines missions aujourd’hui assurées par les agents des collectivités. Parmi ceux qui ne sont pas opposés à la privatisation (41%), les principales missions à transférer seraient l’entretien des routes, de la voirie et des espaces verts.

 

Emmanuelle Quémard

Idée de l’ANDRHDT : un « MEDEF local » pour simplifier la carrière des agents

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Créer un « MEDEF local » qui regrouperait les employeurs des trois fonctions publiques et du privé : c’est l’idée des DRH participants aux ateliers du Congrès annuel de l’ANDRHDT, en septembre 2018.

Concrètement, ils souhaiteraient croiser les problématiques rencontrées par chacun pour créer un observatoire des métiers – sur le modèle des GPEEC – et ainsi anticiper les changements sur le marché de l’emploi « avant de les subir », souligne Nadine Sattler-Jung, Cheffe du pôle Recrutement externe à la Région Grand Est. Ce serait aussi un lieu de partage d’expériences, d’idées, et de mise en commun de solutions concrètes pour faciliter le recrutement et la mobilité des agents : bilans de compétences, formations, parcours mixtes (public-privé)…

 

Une idée issue des difficultés quotidiennes en RH

 

Pour Nadine Sattler-Jung, c’est bien « la révolution de l’emploi à vie » (le thème du Congrès) qui rend nécessaire ce genre d’outil. Selon elle, l’arrivée d’une nouvelle génération « qui ne reste pas 40 ans dans le même emploi », conjuguée à des évolutions techniques et technologiques entraînant création de nouveaux métiers et obsolescence de certains autres, engendre « un grand paradoxe : les gens cherchent du boulot, tandis qu’il y a des entreprises ou des collectivités qui ne trouvent personne ».

Le problème, outre les difficultés de recrutement, c’est que le bien-être finit aussi par en pâtir : « Quand des métiers sont en tension, ça veut dire que […] quelqu’un d’autre fait le travail pour plusieurs, est fatigué, enchaîne les arrêts maladie, etc. » Ainsi, ce « MEDEF local » permettrait de « prendre les problématiques en amont »… Pour trouver des solutions avant de subir les changements du marché de l’emploi.

 

L’idée : Élargir les bassins d’emploi pour favoriser les mobilités

 

Ce « MEDEF local » travaillerait aussi sur des territoires plus larges, dans la mesure où « le territoire est de plus en plus vaste. Sans vouloir répondre nécessairement aux agents prêts à aller au bout du monde pour trouver le job de leurs rêves », le niveau de réflexion est au moins régional. Il croise les missions des centres de gestion, mais les dépasse dans l’ambition de décloisonner les secteurs publics et privés, explique Nadine Sattler-Jung.

Une mobilité accrue géographiquement, mais aussi administrativement ; l’un des principes phares serait de donner une véritable effectivité aux passages entre les trois fonctions publiques. La réalité est encore très largement théorique, ainsi qu’en externe, en reconnaissant et valorisant d’autres experts professionnels, notamment privées. Pour Nadine Sattler-Jung, cela simplifierait la carrière, tout en enrichissant les collectivités : « Je pense qu’il y a une plue-value d’un agent public dans le privé […], et inversement : des connaissances, des compétences, un point de vue… Une richesse. »

 

« En collectif, on est plus intelligents »

 

De l’aveu de Nadine Sattler-Jung, nombre de DRH éprouvent une grande impuissance face aux évolutions rapides du marché de l’emploi. Alors, que ce « MEDEF local » voit le jour ou pas, l’imaginer a déjà été une bonne occasion d’échanger entre employeurs… Et de commencer à mettre en œuvre l’idée même du Congrès de l’ANDRHDT, résumée par Patrick Coroyer, son président : « en collectif, on est plus intelligents ».

 

Julie Desbiolles