Emplois fonctionnels : des compétences sur le carreau lors des alternances politiques

La « fin de détachement sur emploi fonctionnel », une tendance en hausse…

Perte de confiance… L’expression est souvent lâchée abruptement par le nouvel exécutif local à la suite d’une alternance politique. Et elle peut faire mal au cadre territorial insuffisamment préparé. Les territoriaux occupant des emplois de direction, à l’articulation entre le politique et l’administration, savent pourtant qu’ils sont assis sur un siège éjectable. La loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale définit précisément les contours de ces emplois fonctionnels liés à la taille des différentes strates de collectivités. La précarité de ce type d’emploi, que l’on soit DGS, DGA, DGST ou directeur d’établissement public, est pour cette raison assortie de garanties statutaires lors de la fin de fonctions.

S’il est difficile d’avoir un chiffre exhaustif des DG qui se retrouvent momentanément sans poste, se dessinent toutefois des tendances inquiétantes aux yeux des associations professionnelles de territoriaux. En effet, au gré des mouvements de balancier politiques et des multiples réformes territoriales, le recours à la « fin de détachement sur emploi fonctionnel » s’est intensifié depuis 2014.

« Ce phénomène a pris davantage d’ampleur depuis 2008 et s’est encore accru aux dernières élections, remarque Hélène Guillet, secrétaire nationale adjointe du Syndicat national des directeurs généraux des collectivités territoriales (SNDGCT) et DGS de Vertou (44). Toutes les strates de collectivités, y compris les plus petites, sont concernées. Et les ruptures ne se passent pas toujours très bien. En dehors de certains cas liés aux individualités, les nouveaux exécutifs ont, en effet, une nouvelle manière d’aborder l’emploi fonctionnel. La brièveté des contrats ne les effraie pas. »

Anticipation et mobilité

Selon les premiers résultats et analyses d’un questionnaire présenté  par le réseau médiation du SNDGCT en juin 2017, 51 cas individuels ont été signalés sur 6 mois, majoritairement en communes (34) et communautés de communes (9). Parmi eux, sont recensés 40 DGS (27 femmes, 13 hommes) et 11 DGA (6 femmes, 5 hommes). En outre, 25 de ces situations concernent des fins de détachements sur emploi fonctionnel, dont quatre suite à une fusion. Les deux strates les plus impactées sont les communes de moins de 5000 habitants et celles de 40 à 80 000 habitants.

Si les fonctionnaires concernés, le plus souvent de catégories A et A+, ne veulent pas se retrouver confrontés du jour au lendemain à des situations personnelles et professionnelles difficiles, l’anticipation devient alors nécessaire. Des portes de sortie sont certes prévues par les textes (reclassement, mise en surnombre, congé spécial…) mais la gestion de sa propre carrière peut être une solution plus valorisante pour les cadres supérieurs de la territoriale.

« Nous devons veiller au respect des conditions juridiques et à une sortie par le haut lors des fins de détachement, affirme Hélène Guillet. Mais, les DGS et DGA, quelle que soit la taille de leur collectivité, doivent mieux intégrer la dimension mobilité et continuer à faire vivre leur réseau professionnel tout au long de leur carrière. Ils doivent également être à l’écoute des signaux faibles à l’intérieur de leur structure. »

Il n’en demeure pas moins que le régime de la fin de fonctions comporte un effet pervers. Il institutionnalise un véritable gâchis des compétences et de la matière grise.

Emmanuelle Quémard

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