Comment les petites communes se sont-elles adaptées aux obligations de dématérialisation ?
Elles se sont mises à la dématérialisation. Nous rencontrons les mêmes difficultés que dans les grandes collectivités. L’idée est de savoir comment aborder cette transformation majeure et ce que l’on est en mesure de faire. Certaines communes ont voulu faire tout d’un seul coup. Or, parfois, il faut savoir y aller avec discernement.
Pouvez-vous nous en dire plus sur cette conduite du changement à effectuer ?
Derrière le mot « dématérialisation », on ne doit pas sous-estimer la nécessité d’une nouvelle organisation des ressources humaines, un nouveau périmètre de certains métiers. Il est donc impératif d’accompagner cette conduite du changement. La dématérialisation redessine le fonctionnement de l’organigramme. Dit autrement, c’est la chaîne du management qui s’en trouve modifiée avec des process plus horizontaux. Au temps du format papier, le circuit des validations était souvent fléché en mode vertical. Aujourd’hui, certains chefs de service peuvent se sentir « squizzés ». Cette nouvelle circulation de la validation doit être bien définie en interne.
Comment mettre en place cette dématérialisation concrètement ?
Il faut partir de l’existant. Faire un état des lieux des procédures en cours, sans jugement. Il faut également avoir en tête que la dématérialisation n’est pas un but en soi mais un moyen pour des objectifs. Mais également être clair sur les buts à atteindre en sachant que ces nouveaux outils impactent le directeur comme l’assistante, ainsi que les agents opérationnels. Il s’agit aussi parfois de modifier certaines fiches de poste. Par exemple, au service du courrier, un agent gérait mécaniquement l’entrée des plis de la poste et les enregistrait ou pas. Avec la dématérialisation, son temps de travail est modifié et son métier valorisé mais différent. Il faut rappeler que la dématérialisation présente trois avantages : la traçabilité, la sécurité et la rapidité des tâches. Certains agents peuvent ressentir une « pression-machine », comme une forme de flicage alors qu’il s’agit de sécuriser les flux. C’est une aide pour tous.
Est-ce que cela coûte cher aux communes ?
Oui. Les éditeurs de logiciels occupent le marché et ont tendance à augmenter leurs tarifs, sans compter le passage en mode SaaS (1), les formations, les montées en version… La difficulté est que ce coût affecte directement les budgets de fonctionnement des collectivités. En effet, on loue un service alors qu’auparavant, nous achetions des licences. Il faut essayer de trouver un autre modèle, plus collaboratif, pour sortir de cette dépendance. Car nous ne pourrons plus suivre ces charges exponentielles indéfiniment.
Stéphane Menu
(1) Le mode SaaS (Software as a Service) est un concept assez récent qui offre la possibilité aux entreprises et collectivités de s’abonner à un logiciel à distance au lieu de les acheter.
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Le conseil de l’interviewé « Travailler ensemble dans le cadre intercommunal » Pour les petites communes, il faut d’abord définir les priorités et les besoins. Il faut ensuite faire le tour des moyens humains et financiers et avoir une réflexion stratégique concernant la bonne échelle opérationnelle. Cela signifie que les collectivités font toutes les mêmes métiers, parfois avec des logiciels métiers identiques. Il ne faut pas hésiter à se regrouper et travailler ensemble, par exemple dans le cadre intercommunal. Car la dématérialisation n’est qu’une brique d’un processus plus large pour bâtir une stratégie numérique locale. |
