Madame le ou madame la ?

Il est toujours révélateur lorsque l’on écrit quelques lignes sur la féminisation des noms de métiers de se voir, pour certains d’entre eux, rappeler à l’ordre par le « correcteur »  de son ordinateur… je vais dès demain  prendre l’application « correctrice ».

Ce débat animé n’est pourtant pas récent, comme le rappelle  l’ouvrage « Femme , j’écris ton nom » * : déjà en 1929, dans  son recueil au titre évocateur, « Querelles de langage », le grammairien André Thérive citait « la querelle des féminins, qui a fort agité l’opinion […] », et évoquait, entre autres, l’acceptabilité de doctoresse et de autoresse, la fortune de chefesse et typesse, la connotation ironique donnée à peintresse et la rareté de artisane. »

Aujourd’hui encore, si une femme dirige  une école, on dira naturellement Madame la directrice ; mais si elle gère une entreprise ou une collectivité locale on hésitera encore trop souvent entre Madame le directeur ou la directrice .

J’aime assez l’idée que Madame le Directeur ramène à la fonction, et Madame la Directrice à la personne… l’occasion de rappeler à certains managers territoriaux, souvent masculins, que  l’autorité n’est pas directement liée à la fonction !

Hugues Perinel

* Femme, j’écris ton nom… : guide d’aide à la féminisation des noms de métiers, titres, grades et fonctions d’Annie BECQUER Bernard, CERQUIGLINI, Nicole CHOLEWKA. Editions La Documentation Française.

Les années 2010 dans la Fonction publique, une période de transition ?

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Cette époque est celle  des acronymes intrusifs (LOLF, RGPP, MAP), des anglicismes (« le new public management »), des mots en « ion » (rationalisation, mutualisation, évaluation). L’époque où certains pourront dire à l’heure de transmettre : « J’ai vu l’assaut par le Privé du Public, vieille citadelle pas si imprenable que ça, prise d’assaut par les troupes félonnes de la coalition de la Modernité et de la Performance réunies. J’y étais. »

Faut-il pour autant développer ce syndrome obsidional ? Faut-il s’effrayer ou se réjouir de ce temps troublé ? Que valent vraiment les forces en présence ? Le Privé semble invincible avec les trois pointes (dynamisme-productivité-rentabilité) de son trident, le Public est affaibli par des années de mauvaise image entretenue et de mauvais choix, sans compter les forces du SI avec ses fantassins en « el » (progiciels, systèmes décisionnels…) et sa cavalerie en « ique » (numérique, électronique…), déjà présents dans la place et qui s’imposent peu à peu sans pretium doloris apparent, avec leurs larges sourires des lendemains qui chantent et auxquels il est vain de s’opposer…

Et si le Public commençait déjà par croire en lui ?

Le Public et le Privé sont-ils comme deux gouttes d’huile et de vinaigre qui ne se mélangent pas ? N’y-a-t-il vraiment aucune voie vers un syncrétisme ? Certains ne voient qu’un champ de batailles, d’autres ferment les yeux ou sont déjà partis à l’infirmerie, beaucoup s’interrogent encore et pour tous, se fait entendre et se rapproche le fond sonore envahissant et inexorable des tambours de l’adaptabilité.

Résister ? Mais à quoi ? Faut-il vraiment se battre du haut des remparts ? Me vient alors un vieux proverbe portugais : « Quand vient la tempête, certains construisent des digues là où d’autres construisent des moulins. » Le souffle est déjà là, j’espère que je saurai être un bon meunier…

Jean-Jacques Roux – DGS de la ville de Marignane

Chiens au travail : l’antistress de l’openspace !

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Baisse de l’hypertension, diminution du stress… Même le philosophe et sociologue Frédéric Lenoir n’en démord pas : « L’animal est un bon médiateur et crée des liens de convivialité entre les employés*. » Depuis des années, les études se succèdent pour toutes témoigner du formidable impact de la présence des chiens sur les lieux de travail. Du coup, une entreprise américaine sur cinq autoriserait déjà la gamelle d’eau sous le bureau tandis que, chaque année depuis 2014, la journée « Bring your dog to work day » tente d’en élargir l’initiative à des centaines d’autres patrons de tout poil, que ce soit au Royaume-Uni, aux États-Unis ou aux Pays-Bas… Une niche dans laquelle les organisations tricolores pourraient bien être, aussi, tentées de s’engager, pour le plus grand bonheur de ces milliers de propriétaires d’animaux dont 84 % rêvent d’emmener Médor au boulot*.

Mais attention : car si les entreprises sont ainsi de plus en plus soucieuses de caresser leurs collaborateurs dans le sens du pelage, ces derniers pourraient bien finir par tomber sur un os, privés de l’excuse de rentrer pour promener Mirza. D’ailleurs, c’est, là encore, scientifiquement prouvé : sur les lieux de travail, la présence des toutous augmente nettement la fidélité… des maîtres ! Mais, in fine, qu’importe si derrière cette histoire de chien se cache – ou pas – un loup, introduit au seul nom de la productivité. L’important reste toujours qu’en bout de chaîne, plus personne ne se fasse aboyer dessus.

* Lu sur www.lefigaro.fr – 23 juin 2017 ** Site animalier Wamiz – Avril 2017

Laurence Denès

Le fonctionnaire et le philosophe. Dialogue sur l’intérêt général

A lire : "Le fonctionnaire et le philosophe". Par Hugues Perinel sur Etoile Mag

Si le « sens de l’intérêt général » demeure une formule usitée, la définition de ce concept va de moins en moins de soi, dans une société où il est de plus en plus difficile de définir et de se prévaloir de la « volonté générale ». Conscients de ces difficultés, les auteurs  – François Chambon et Martin Steffens – ont considéré que le dialogue était une autre façon de contribuer à répondre aux questions que le citoyen, l’usager et le contribuable sont légitimes à se poser. Qu’est-ce que le service public ? A quoi sert l’administration ? Qu’est-ce qu’un fonctionnaire ? Quels sont ses sources ? Ses ressources ? Sa vocation ? Son temps et son espace ? Ses défis ? Son art ?

Une approche originale, un dialogue sur l’intérêt général entre un philosophe et un fonctionnaire. L’homme des concepts interroge et pousse dans ses retranchements l’administrateur, dans le seul but de répondre à la question qui transcende toutes les autres : qu’est-ce que l’intérêt général ?

Hugues Perinel

Livre Le fonctionnaire et le philosophe. Mettis Editions. 

Dim. 14,9 x 21 cm.  128 pages.

« Etre fonctionnaire, une superbe mission ! »

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Quels conseils donneriez-vous aux cadres dirigeants des fonctions publiques pour relever le défi que leur impose à la fois le numérique et un contexte de réforme permanente qui laisserait supposer que la fonction publique n’est pas irremplaçable ?

La remise en cause de la fonction publique repose sur trois idées reçues auxquelles il est facile d’opposer des contre-arguments. 1, il y a trop de fonctionnaires et ils coûtent trop chers. 2, la révolution numérique va supprimer des fonctionnaires et c’est une bonne chose. 3, les fonctionnaires ont bien de la chance d’avoir un emploi à vie face à des salariés du privé plus exposés face aux fluctuations économiques. C’est oublier qu’en France, on n’est pas plus à gauche qu’à droite en matière de gestion du bien public que l’on a décidé de confier à l’Etat. La France, c’est l’Etat. Notre pays est confronté à plusieurs fractures : spatiales, numériques, familiales, intergénérationnelles (jeunes bloqués, séniors épanouis), éducatives, professionnelles, communautaires, etc. Peurs écologiques, migrants, jeunes, face à la montée de l’impuissance publique. Pour s’adapter, la fonction publique doit prendre le train numérique, repenser ses métiers et ses organisations en urgence.

Comment verriez-vous évoluer cette fonction publique dans les prochaines années ?

Je ne pense pas que l’on va diminuer le nombre des agents dans les trois fonctions publiques. Elles se transformeront, passant de fonctionnaires qui fonctionnent, si j’ose dire, à savoir qui suivent de près le bon fonctionnement des règlementations, travail qui sera rapidement automatisé, à des fonctionnaires qui missionnent, à savoir des agents qui prennent plus de temps de réfléchir à la pertinence de l’intervention publique sur le bâti et l’humain. Si l’on se réfère au dernier sommet européen de Talin en septembre, consacré justement aux impacts de la révolution digitale sur les administrations, l’Estonie montre l’exemple en numérisant toutes ces données et en réduisant ses coûts de 2 % par an. En France, ça va prendre du temps mais cette transition permettra de conférer aux fonctionnaires la mission de diminuer les peurs dont je parlais plus haut. Car il ne faut pas se tromper de révolution : le digital transformera des circuits logiques organisationnels et non des problèmes sociaux.

En interne, quel discours les cadres dirigeants doivent-ils tenir, dans un contexte d’avenir peu perceptible ? Comment mobiliser des agents dans un contexte si incertain ?

Etre fonctionnaire, c’est un boulot qui a du sens, même si parfois les fonctionnaires l’oublient ou qu’on oublie de le leur rappeler. Or, c’est une superbe mission. Beaucoup de salariés du privé envient les fonctionnaires, l’engagement des salariés du privé ne servant qu’à arrondir les dividendes des actionnaires. Il faut que les cadres se persuadent de plusieurs choses : non, la fonction publique ne sera pas remplacée ; il n’est pas sûr qu’elle régresse autant que certains le redoutent ; elle va se transformer, passant du service public à la transformation publique. Il y a donc un bel avenir pour elle. Il y aura un affaiblissement du lien hiérarchique, statutaire. On sera moins dans la logique, dévolue aux algorithmes du numérique, mais plus dans la gestion des émotions, que l’on n’apprend pas dans les écoles de formation des futurs cadres de la fonction publique et c’est bien dommage. Il y aura une attente d’un leadership humble, qui éclaire le sens plus qu’il ne donne d’ordres. Ce qui va tout changer : salaires, rapport à la hiérarchie, etc. J’aime bien la phrase du philosophe Thucydide : « L’épaisseur d’une muraille compte moins que la volonté de la franchir ». A méditer…

Interview de Stéphane Menu

Des « pantoufleurs » sachant pantoufler

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EDF, Veolia ou encore BNP Paribas… De grands groupes aux épaules solides qui n’hésitent pas à recruter dans la fonction publique, essentiellement d’Etat, pour renforcer leurs équipes. Quid, dans ce cas-là, du « pantouflage » ?

Auditionnés le 21 novembre dernier, les DRH sont unanimes : il faut plus de contrôle ! Mieux encore, dans le cas où des agents publics partis dans le privé reviennent dans leurs administrations d’origine, le dit contrôle (aujourd’hui inexistant) serait des plus utiles. Il n’est pas rare que certains hauts fonctionnaires, après un passage dans le privé, décident de revenir à leurs premières amours publiques. Ils passent alors par la Commission de déontologie de la fonction publique qui émet parfois des avis favorables mais « avec réserves ». Ces dernières peuvent ainsi empêcher certains d’entre eux de renouer avec leur administration d’origine.

Or, le moins que l’on puisse écrire, c’est que les dites « réserves » ne font pas l’objet d’un contrôle poussé, tant s’en faut. « L’administration ne nous a jamais contactés », avoue ainsi Jean-Marie Lambert, DRH de Veolia qui « recrute entre un et cinq fonctionnaires par an ». Même son de cloche du côté de Nicole Verdier-Naves, directrice dirigeants, talents et formation des managers à la DRH du groupe EDF : « Je n’ai jamais eu de suivi des avis de la commission [mais] je n’ai pas encore eu à sanctionner un agent pour défaut de déontologie ou de non-respect de l’avis de la Commission ». Co-rapporteur de la mission, le député Les Républicains Olivier Marleix ne peut que regretter de « fortes lacunes » en la matière, pouvant déboucher sur de « potentiels » conflits d’intérêt. « Personne n’effectue véritablement le contrôle des relations entre les fonctionnaires partis dans le privé et leur administration d’origine, insiste le parlementaire. Les administrions ne sont pas organisées pour faire respecter les avis de la Commission de déontologie ».

Les députés Fabien Matras et Olivier Marleix, respectivement président et co-rapporteur de la mission d’information, rendront les conclusions de leurs travaux devant la commission des lois de l’Assemblée nationale à la mi-décembre. A l’heure où le besoin de transparence est porté comme un étendard, on peut imaginer que des mesures fortes seront alors annoncées… et exaucées par le privé !

Stéphane Menu

Formation territoriale : ouvrons le débat !

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Jean Marc Sauvé, qui préside aussi le conseil d’administration de l’ENA, s’est exprimé récemment sur  les évolutions des besoins en compétence de la fonction publique et en conséquence sur les modifications  des formations dispensées dans cette école. Mais qu’en est-il des collectivités locales ?

Les concernant, du fait du principe de leur libre administration, la formation de leurs agents dépend de leur action. Pour ce faire, elles disposent notamment d’un outil, le CNFPT, et d’une école, l’INET. Mais il y a bien longtemps qu’une réflexion impliquant  les employeurs à savoir les élus, et les agents territoriaux  ne s’est pas produite,  alors que leurs champs d’activités et les attentes de nos concitoyens changent fondamentalement. Le CNFPT a en son sein un Conseil National d’orientation ; il pourrait se saisir de ces questions et impliquer fortement le Conseil Supérieur de la fonction Publique territoriale. L’INET pourrait également lancer, enfin, un vrai conseil scientifique, qui travaillerait et proposerait sans tabous  de nouvelles manières de former et d’apprendre. Comment faire face aux prévisibles évolutions institutionnelles ? Quelle place pour les collectivités dans le concert national et quels besoins de compétences ?

L’action territoriale doit sortir du conformisme du « toujours plus » et de la sempiternelle revendication financière. Les agents publics locaux doivent faire preuve d’indépendance et d’innovation, les élus doivent prendre conscience que par delà la charge qu’ils représentent, leurs agents sont une ressource. Il est temps d’ouvrir ce débat.

Christian Olivérès

 

En Eure-et-Loir, on prépare la relève des secrétaires de mairie

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On les présente comme les petites mains de la fonction publique territoriale de proximité.  Mais elles sont bien plus que ça. Sans les secrétaires de mairie, une partie de la France rurale ne serait pas la même. En Eure-et-Loir, le Greta et le Cdg 28 ont mis au point une formation de secrétaire de mairie et d’adjoint au cadre en collectivité grâce au soutien financier de la Région. Un tiers des secrétaires de mairie partiront à la retraite en 2020 ; il fallait donc réagir. Depuis 2010, le dispositif a permis de former 86 stagiaires dont le taux de retour à l’emploi avoisine les 80%. L’objectif est clair : professionnaliser des demandeurs d’emploi afin de les rendre opérationnels et employables pour répondre aux besoins des collectivités quelle que soit leur taille. Pour se présenter à la formation, les stagiaires doivent être inscrits à Pôle emploi et être bacheliers. Face au succès de cette formation, le Cdg a déposé une demande de validation de cette certification dont les stagiaires pourront bénéficier rétroactivement jusqu’à 3 ans en arrière.

Stéphane Menu

Travailler, ce n’est pas si dur !

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Dans les colonnes du magazine Up Le Mag, Antoine Van Den Broek, cofondateur de la Mutinerie, apparaît comme un pionnier en la matière. Mutinerie fut l’un des premiers espaces de coworking en France, réunissant des free-lances de tout poil, réuni autour d’un magazine en ligne. Et les personnes embarquées dans l’aventure ont tellement apprécié qu’ils ont créé Mutinerie Village il y a trois ans, à Le Perche, à 1h30 seulement de Paris.

Tous les ingrédients de la vie en co-mmunauté s’y retrouvent, auxquels il faut ajouter « un potager en permaculture de 800 m² et un markerspace », à savoir un atelier de fabrication disposant d’une imprimante 3D, d’une découpe laser et d’une fraiseuse numérique. « L’idée ? Permettre aux indépendants de séjourner à la campagne pour y travailler les pieds dans l’herbe, partager des moments conviviaux avec les résidents du moment et, pourquoi pas, élaborer des projets ensemble ». Le tout en impliquant dans l’écosystème les artisans locaux, pour y vivre à la fois des moments d’échanges et faire naître pourquoi pas des projets communs. Le concept transpose en quelque sorte les possibilités offertes par les réseaux sociaux dans un cadre physique, cool et hyper-connecté. Des façons de travailler qui gagnent du terrain, en France et dans le monde. Qui n’a jamais rêvé de bosser les pieds nus caressés par l’herbe fraîche ?

Stéphane Menu

Le contrat de confiance… à durée déterminée

Avis d'Hugues Perinel sur le livre Managers Libérez Délivrez... Surveillez? Les 6 clés pour travailler en confiance. Editions du Cherche Midi.

En êtes-vous si sûr ? Le grand écart n’est-il pas chaque jour plus grand entre l’affichage d’un management bienveillant et respectueux des individus et la réalité des tensions à l’œuvre dans nos organisations au quotidien ?

Bienvenue dans le nouveau monde ! Nos organisations vivent des tensions inédites dans leur management et une perte de repères à tous les niveaux : révolution numérique, transformation des espaces de travail, organisations kaléidoscopes, nouvelles mesures de la performance…  autant d’atouts pour un management transparent et libéré mais autant d’occasions de perdre la confiance de vos équipes.

La transparence permise par la transformation numérique est-elle réellement un progrès managérial ou un recul pour la confiance au quotidien ? Le mouvement vers des organisations  plus libérées correspond-il vraiment à un avenir radieux ?

Prenez le temps de lire « Managers : Libérez délivrez… surveillez ? » écrit par Frédéric Petitbon, Julie Bastianutti et Marguerite Descamps ; notamment  pour les 6 clés proposés par les auteurs pour de nouveaux rituels de confiance. On retiendra notamment le « C2D2 – à chacun son Contrat de Confiance à Durée Déterminée » et le « ritualiser l’espace de sa tribu » qui sonneront juste dans de nombreuses collectivités.

Hugues Perinel

Livre  » Managers : Libérez délivrez… surveillez ? » Les 6 clés pour travailler en confiance. Editions du Cherche-Midi. Parution : 9/11/2017. Dim. 14 x 22 cm. 176 pages.