Vers des communes sans DGS ?

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Depuis l’arrivée de nouveaux élus au dernier scrutin municipal, il était coutumier d’entendre tel ou tel DGS s’inquiéter de ces maires de plus en plus présents sur leur territoire.

La loi anticumul, les dernières élections législatives et sénatoriales, ont fait à nouveau monter en flèche le nombre de ces maires ou présidents à temps plein. Au cours d’une récente rencontre avec divers élus de tout bord, j’ai découvert que certains DGS allaient avoir à faire face à une difficulté d’un tout autre ordre… Plusieurs de ces édiles envisagent en effet une solution plus définitive : ne plus avoir de DGS et diriger leur collectivité dans une posture qui ressemble étrangement à celle d’un Président Directeur Général !

Une tendance à surveiller

Quelques jours plus tard, je lis dans la Gazette des communes * que « les ex-collaborateurs de cabinet en collectivités et anciens DGS représentent 25 % des maires de villes de plus de 30 000 habitants. Un taux qui atteint près de 50 % parmi les nouveaux premiers magistrats de cette strate ». Coïncidence ou corrélation ? Une chose est certaine, si cette tendance s’accentue lors des prochaines municipales, la question de la gouvernance de nos collectivités se posera d’une façon inédite.

Hugues Perinel

*Parution du 20/09/2017.

« Comment anticiper les RH dans une entreprise privée à l’histoire publique » ?

interview Florence Boughanem Etoile Mag

A Orange, vous êtes vous-même toujours liée à un statut de fonctionnaire dans une entreprise dont le statut est privé. Comment cohabitent les deux typologies d’emploi au sein de l’entreprise ?

Effectivement, je suis fonctionnaire depuis mon entrée à France Telecom en 1992, après avoir passé un concours externe. 25 ans après mon intégration dans le groupe, qui s’appelle désormais Orange, je gère un portefeuille de salariés aux nombreux statuts. Du fait de notre histoire, de notre culture et des nombreux changements que nous avons dû conduire, nous avons recruté des salariés aux parcours variés. Fonctionnaires, détachés, CDI, CDD, alternants, … cohabitent très bien et font la richesse de nos équipes. Il faut vraiment avoir l’œil d’une responsable RH pour distinguer chez nous fonctionnaires et salariés contractuels de droit privé. Nos accords d’entreprise visent l’équité de traitement entre statuts. Que ce soit sur le temps, l’organisation et les modes de travail, la rétribution, la reconnaissance des compétences et des qualifications, nos accords ne font pas de distinction de fond entre les fonctionnaires et les contractuels. Seul le « contrat » de départ et certaines règles de gestion individuelle (congés maladie, retraites, …) diffèrent.

Comment initier une réorganisation de travail, dans un secteur comme le vôtre où l’adaptation au changement est une nécessité pour survivre face à la concurrence ?

En effet, le changement est notre quotidien dans un secteur d’activité porteur, qui se livre à une guerre des prix permanente et rivalise d’offres commerciales, confronté à une régulation du marché très prégnante et des innovations technologiques et digitales permanentes. Notre ligne managériale privilégie la gestion stratégique de l’emploi et de nos compétences. Anticiper les recrutements pour permettre le transfert de l’expertise, en misant sur nos salariés confirmés sur le départ (temps partiel sénior ou retraite) vers nos nouvelles recrues plus jeunes, plus digitales. Nous misons aussi sur l’organisation apprenante qui, au-delà des formations initiales, met l’accent en permanence sur le tutorat, le partage de pratiques en ateliers, le mentoring (Ndlr, relation interpersonnelle de soutien) et le reverse mentoring, l’entraide au sein des équipes, etc. Autre point : nous ajustons en permanence les ressources en fonction de l’activité et de la charge de travail. Enfin, on parle beaucoup de télétravail : 17 % des salariés au sein de mon unité y ont recours, sans compter le télétravail occasionnel, très répandu.

Après le terrible épisode des suicides à France Télécom entre 2008 et 2009, comment l’entreprise a-t-elle repris la main ? Et pourquoi cette anticipation du risque n’avait-elle pas été possible avant ?

Le nouveau PDG Stéphane Richard a su redonner confiance à ses cadres dirigeants, ses managers de proximité, ses salariés. D’abord à travers ce que nous avons appelé les Assises de la refondation puis la démarche Conquêtes 2015. Enfin, Essentiels 2020 a permis de décliner des projets d’unité et d’équipe au plus près du terrain. Au final, nos salariés se sont approprié la stratégie de l’entreprise, comme l’indique notre baromètre social. En 2010, Orange a signé un nouveau contrat social en prenant des engagements forts : pas de plan social, plans de recrutements externes et alternants, mobilité sur volontariat, renforcement des RH de proximité, accompagnement des managers, etc. En 2016, Orange s’est engagée à être un employeur digital et humain en retenant trois axes : garantir les compétences de demain, développer l’agilité collective, favoriser l’engagement des salariés. Les managers ont été mieux impliqués à travers un accompagnement renforcé : Orange Campus, certifications, coaching, co-développement, mentoring. Enfin, des dispositifs ont été mis en place pour mieux remonter les préoccupations des salariés dans le cadre d’un management beaucoup plus participatif s’inspirant des fondements de l’entreprise libérée.

Propos recueillis par Stéphane Menu

 

Managers des collectivités territoriales : le grand écart !

Managers des collectivités territoriales : le grand écart !

Le casse-tête de la nouvelle organisation territoriale

Répondre aux injonctions, parfois paradoxales, du pouvoir politique. Mettre en musique compétences et missions de service public. Etre sans cesse à la pointe des réformes institutionnelles et au cœur de l’action territoriale. Veiller en permanence au bien-être au travail des agents… Le quotidien des cadres dirigeants des collectivités n’est pas de tout repos !

Qu’ils soient DGS, DGA, DRH ou DST, les femmes et les hommes exerçant les plus hautes responsabilités au sein de l’administration des territoires vivent fréquemment des heures exaltantes mais aussi des moments difficiles au sein de la même journée . Et la montée en charge de la réforme territoriale ne fait qu’accentuer cette situation schizophrénique par bien des aspects.

La loi Notre du 7 août 2015 « portant une nouvelle organisation territoriale de la République » et la loi Maptam du 27 janvier 2014 « de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles » ont d’abord complexifié la tâche des managers territoriaux. Ces textes avaient pourtant l’objectif de rendre plus digeste le millefeuille territorial. Le jeu des transferts de compétences, les mouvements de personnels qui en découlent, les fusions, les mutualisations de services apparaissent comme autant de casse-tête pour celles et ceux qui sont chargés de les organiser sur le terrain.

Baisse des dotations de l’État

Avec pour unique horizon l’incontournable gestion de la masse salariale, les dirigeants territoriaux éprouvent parfois les pires difficultés à préserver le sens de leur action et les valeurs qui la sous-tendent.

En outre, quatre années de baisse consécutive des dotations de l’Etat (2014-2017) rendent très étroites les marges de manœuvre en matière d’emploi et de gestion des personnels. Selon le 3e baromètre «HoRHizons 2017»* réalisé auprès de 805 collectivités, 73% d’entre elles (+ 8 points par rapport à 2016) ont été impactées par la réorganisation territoriale. Avec des répercussions notamment sur les effectifs, la mutualisation, les conditions de travail, le régime indemnitaire, le dialogue social et la formation.

Le paradoxe étant que les nouvelles missions découlant de la réforme territoriale ont souvent conduit les employeurs locaux à recruter des agents supplémentaires.

Les problématiques nouvelles auxquelles doivent faire face aujourd’hui les collectivités alourdissent fortement l’une des dimensions les plus importantes de leur action. En effet, les contractions des budgets pèsent de plus en plus sur les investissements dont les territoires ont pourtant besoin pour se développer. Rappelons qu’entre 2013 et 2016, les collectivités ont porté les deux tiers de la réduction du déficit public, et qu’en 2016, leurs dépenses totales ont été inférieures de 12 milliards d’euros à la trajectoire prévue !

Un effort irréfutable loin de la gabegie dont sont accusées ces mêmes collectivités !

Emmanuelle Quémard

*Réalisé par l’Institut CSA pour l’Association des maires de France, l’Assemblée des départements de France et Régions de France, en collaboration avec la Fédération nationale des centres de gestion  et le Centre national de la fonction publique.